Je m’appelle Ti Coco.
Quarante-deux ans déjà… et pourtant, parfois, j’ai l’impression de n’avoir fait que tourner en rond, loin de ce que je suis vraiment. Jusqu’à cette nuit-là, où les gramoun (grands-mères) sont venues me chercher. Pas dans mes rêves, non. Dans ce silence qui précède les grandes décisions. Rien ne me retenait, je suis partie. Elles voulaient que je les rejoigne, là où tout a commencé, là où mes racines plongent dans la terre rouge et le sel de la mer.
Elles m’ont dit : “Viens, Ti Coco. Vien retrouv a nou. Vien libèr bann mémwar ki rest dann to kèr.”
(Viens, Ti Coco. Viens nous retrouver. Viens libérer les mémoires qui dorment encore dans ton cœur.)
Comment refuser ?
Alors j’ai pris l’avion. Pas seulement pour aller marcher sur les sentiers de lave ou écouter le vent dans les filaos, mais pour me retrouver. Pour comprendre ces parts de moi que j’avais laissées là-bas, entre les bras de mes aïeules, dans les chants, les silences, les odeurs, les mémoires oubliées.
Je ne marcherai pas seule. J’ai retrouvé des cousines et cousins éloignés qui se relaieront pour m’accompagner et m’enseigner sur le chemin. Il y a aussi des gramoun qui se raconteront à travers les belles zistoir lontan, des présences familières et de la Nature qui me soutiendront. Ensemble, nous traverserons l’île ; elle nous partagera sa force, ses secrets et nous amènera à une part importante d’elle-même : l’Océan et son peuple, les dauphins, les baleines, les tortues… avec de beaux messages.
C’est un retour à la source, une guérison, une promesse faite à mes gramoun : écouter l’île et l’océan et accueillir leurs messages. C’est un voyage inoubliable.
Alor, kosa zot fé ? Zot vini ek mwin ?
(Alors, que faites-vous ? Vous venez avec moi ?
L’appel des gramoun sera parsemé de phrases en créole, traduites juste après. Cela m’a semblé une évidence.
Ce roman est une déclaration d’amour à l’île, à qui je suis, mais je sais qu’il résonnera en chacun, puisque nous sommes tous interconnectés.